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Le Blog notes de Bayajaé

10 avril 2016

UN JEU DE REFLEXIONS

Dans tous les cas, même les plus sérieux, l'ART EST UN JEU.  Tout objet d'art est une scène de théâtre, un spectacle qui vaut le regard qu'on pose sur lui. Pas de valeur en soi, véritablement. C'est pourquoi, tout et n'importe quoi peut être artistique en fonction de la manière dont on le regarde.

En cela, l'art me semble être d'abord une affaire personnelle. Sous cet angle, un miroir s'invite dans cet objet particulier qu'on regarde ; un miroir qui ne nous renvoie pas directement notre image, mais qui nous renvoie à nous-même de multiples façons. Il est à l'image de  l'image que nous nous en faisons.

Bayajaé - Réflexions

Tout et n'importe quoi ?

Serait-ce le cas de la photo de cet article ?

C'est effectivement la photo banale de quelqu'un qui prend une photo. Mais dés lors, rien ne jouerait, pas d'art dans le regard. Une fois encore, à mon sens ce n'est pas l'objet qui est artistique, mais la nature du regard. La question n'est même pas que ce soit soit beau ou pas, que cela plaise ou pas, mais qu'il y ait quelque chose qui joue ou qui se joue aux yeux de qui regarde. Ce peut être modeste, là encore peu importe.

Alors qu'en est-il de cette photo ? 

Une situation de prise de vue spontanée. Je me suis placé devant un grand miroir avec mon appareil photo. Il faisait nuit. Comme le déclenchement du flash allait écraser l'image par la brutalité de son éclair, j'ai pensé à mettre ma main devant pour en atténuer les effets, presque de manière réflexe. La photo fut prise ainsi, sans plus d'examen, sans trop de projets précis, sinon l'dée qui vient et le "pourquoi ne pas le faire". J'aurais pu la supprimer après l'avoir vue et je n'en parlerais pas aujourd'hui

Et poutant j'ai retenu cette photo  

Je l'ai retenue parce-que je l'ai regardée et que quelque chose s'est mis à jouer dans mon esprit.

D'abord il y eut la lumière du flash qui passait à travers mes doigts laissant apparaître le rouge de mon sang. Et l'éclairage de mon visage ? En fait : lumière renvoyée par ma main que le flash illuminait - Miroitement en quelque sorte. Quant au miroir devant lequel je pose ? Il ne se voit pas bien sûr, mais il reçoit mon image pour la retourner vers l'objectif de l'appareil photo, avec une clarté diffuse qu'il ajoute à l'ensemble de mon cadrage. La lumière ricoche en zigzag. Ce sont ces rebonds qui font ce qu'on voit. Il faut se forcer pour les imaginer et poutant ils sont là : leur trace. Regardez le reflet de mon pouce sur le filtre UV de mon objectif, il ne peut provenir que du miroir, pas de la prise de vue directe. Il est l'image reflétée d'une image reflétée, une mise en abîme, ce qu'est toute l'image que je vous présente... mine de rien.

Mais quel est l'intérêt de ces observations ?

Peut-être le fait de ne pas voir forcément ce qu'on a devant les yeux, de le découvrir, simplement et d'y réfléchir... Réfléchir !? Un mot qui colle aux miroirs.

Donc, il semblerait bien que ma photo produise bel et bien  UN JEU DE REFLEXIONS, qui en fait justement un objet d'art... à mes yeux. Pourquoi cela devrait-il être forcément plus sérieux que ça ?

 

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21 décembre 2015

L'ART ET L'ARGENT

Y aurait-il une valeur en soi d'une oeuvre d'art ?

Non, impossible. L'art c'est du vent à la rencontre du sensible. Ce n'est même pas une affaire de beauté.

Une oeuvre est muette comme une image. Oui ! la musique, le chant, la poésie aussi. Il lui faut les "bonimenteurs" pour que ce soit parlant, comme pour le cinéma à ses débuts. Une oeuvre ne devient réellement une oeuvre que si elle rencontre une parole qui se démultiplie et qui la démultiplie. Une oeuvre ne prend sa valeur qu'à la rencontre d'une société si fermée soit-elle. Une oeuvre, comme toute histoire humaine, est une histoire d'amour et d'intérêts, donc aussi une histoire de haine. Et dans cette histoire il y a l'argent, l'argent comme forme de reconnaissance d'une valeur, l'argent comme outil d'attribution d'une valeur.

En quelque sorte, une oeuvre d'art nous raconte et raconte le monde dans lequel nous sommes.

Pour aller un peu plus loin sur ce sujet prenons l'exemple de l'oeuvre contemporaine du photographe allemand Andreas Gursky. Ses créations ne font pas simplement preuve d'une forte inventivité, elles croisent notre époque, avec des effets vertigineux de masse, une esthétique froide et deshumanisée, des rythmes répétitifs enivrants. Son travail est puissant. Il fait oeuvre quoi qu'on en pense. Ajoutons qu'en Allemagne les artistes sont beaucoup plus soutenus qu'en France. Mais une fois qu'une valeur s'impose, c'est le cas ici, on peut être surpris par les niveaux atteints. "Rhin II" une photographie d'Andréas Gursky a été vendue 4,3 millions de dollars lors d'une vente aux enchère à New York en 2011. C'est de la folie sûrement, mais là encore, cela témoigne d'un état de fait contemporain avec ces grandes fortunes qui ne cessent de croître en même temps que grandit la grande pauvreté.

Alors, si on peut dire que l'art photographique s'en trouve globalement valorisé et reconnu, si "Rhin II" prend cette valeur objectivée par l'argent, il se trouve que des galeries ferment et que la majorité des artistes ne peuvent pas vivre de leur travail. 

Cela dit, il n'est pas nouveau que les artistes soient pauvres... je plaisante. De toute manière, si l'argent peut être aujourd'hui une composante de l'oeuvre, au sens de la place de l'argent dans le monde, il ne peut être la référence d'évaluation puisqu'il ne peut y en avoir d'absolue. 

8 octobre 2015

SUR LES APPARTENANCES

Le type de travail que je développe fait partie d'une pratique de l'image qui ne se finalise pas à la la saisie d'une réalité au déclic de mon appareil photographique. L'origine est un point de départ, pas une référence radicale. Je partage cette idée que la photographie reste libre de ses mouvements après la fermeture de l'obturateur. Ce qui ne signifie pas que, dans mon esprit, il y ait par exemple, opposition entre une approche argentique classique de la prise de vue et une approche numérique de montage post-prise de vue. Il y a différence, c'est tout.

Bayajaé - Cascade

Lorsque ce qui origine continue sa route

Pour construire un tableau, je pars d'éléments photographiques venant de mes prises de vue en situation habituelle, mais qui sont comme des rushes vidéo en attente de montage. Ces éléments déploient ensuite dans mon esprit et sur l'écran de mon ordinateur des rencontres graphiques progressives qui résonnent en moi de manière personnelle. Ça part souvent d'une histoire mais qui se continue en une nouvelle histoire, autant imprévue qu'imprévisible.

Cela peut déboucher comme ci-contre sur une construction imaginaire donnant libre cours à des thématiques que j'ai déjà utilisées : celles de mannequins innanimés prenant dans mon esprit posture vivante, là où la vie est une représentation, c'est à dire une image. 

Au départ de ce tableau, il y a une chute d'eau et un rocher. En terme photographique, l'image aurait pu suffire. Or justement, dans ma pensée même, l'origine ne peut suffire. Elle est le départ du voyage. Le voyage peut circuler dans cette origine, mais pas forcément... surtout pas forcément. L'origine ne donne pas obligation de fidélité. Elle ne l'interdit pas non plus.

En l'occurence au terme des transformations : plus de chute, plus de rocher. Reste-t-il quelque chose de cette origine ? oui ! des lignes graphiques, un titre "Cascades" et sa forme comme trace du mouvement. Peu de choses diriez-vous et rien qui en racconte l'histoire. Il reste que cette histoire existe.

La forme que prend le tableau donc, n'appartient pas à son origine. Il n'en est pas la représentation, l'attachement. Il en est la suite, la continuation.

L'appartenance à un style remplacerait-elle l'appartenance à une origine ?

J'ai utilisé le terme d'imaginaire bien que ce ne soit pas la question qui m'intéresse prioritairement. Il ne s'agit pas pour moi essentiellement de passer du réel à la rêverie, ni même de le fuir. C'est le mouvement de transformation qui m'intéresse, le passage attentif, voir attentionné d'une forme à une autre, avec le hasard qui s'y mêle souvent. 

En fait, il s'agirait là de ne pas obéir à un système de référence radical et notamment pas celui de nos origines, ni celui d'une tendance établie. Une liberté de penser donc, mais qui ne soit pas sans mémoire y compris celle de nos origines. En ce sens il s'agirait de prendre en compte le principe de l'infinité des points possibles d'où on regarde, en refusant l'obédience et les identifications massives à un groupe d'appartenance. L'appartenance est une forme de reconnaissance certes, mais elle est la marque d'une préférence qui me semble trompeuse et source de guerre.

Bayajaé - Le Verre Rouge

Pas une appartenance mais un écho

Si je prends l'exemple du tableau photographique ci-contre que j'ai réalisé début 2015, il me semble justement accompagné de cet état d'esprit dont je parlais dans l'article précédent.

Au départ, de ce tableau il y a une série de photos "mitraillées" à une fête de la musique en 2013. Photos de foules, bougés, sous-expositions... L'idée était de chercher dans des images qui n'avaient pas de valeur en soi, des détails graphiques ou des contenus qui retiennent mon attention.

Le détail que j'ai retenu ici était lié à l'attitude des personnages et à la lumière : des personnages perdus dans leurs pensées, une lumière très sombre et des tâches claires. Mais surtout ils étaient à peine perceptibles, tellement minuscules, perdus dans la foule. La surface de leur présence était une cinquantaine de fois plus petite que la surface de la photo où ils apparaissaient. C'est le fort agrandissement de cette toute petite partie d'image qui m'a intéressé ; le fait de cette photo dans la photo et son résultat : une image granuleuse. Pas n'importe quel grain : celui qu'on trouve un peu dans le néo impressionnisme de Georges Seurat. Est-ce à dire à ce moment là que l'image appartiendrait à un mouvement "pointilliste" effectivement daté ?

Je crois que c'est l'écho graphique et émotionnel des peintures de Seurat dans ma mémoire qui a orienté mon attention. Une trace d'enfance. Ce tableau n'avait pas pour projet de faire du "Seurat". Il est le hasard d'une rencontre sur fond de mémoire. Il est l'effet d'une résonance, il n'est pas la marque d'une appartenance. L'idée finalement était d'intégrer cette résonance, cet écho dans un travail contemporain, sans être prisonnier de ce qui aurait paru contraire à l'idée de contemporainéité. Si la forme semble s'approcher du néo-impressionnisme, la démarche est celle d'une rencontre fortuite au cours d'un voyage du regard. De toute manière la démarche n'est pas celle de Georges Seurat. Tout au plus elle en croise une forme approchée. Et dans tous les cas elle n'identifie pas la démarche à un modèle de la fin du 19ème siècle, elle témoigne de ma liberté et de l'émotion d'un instant.

 

15 septembre 2015

SUR LA CRÉATION ARTISTIQUE AUJOURD'HUI

De tout temps, la création artistique a pris forme dans le monde d'où elle émerge.

Nous sommes tous traversés par ce qu'est le monde dans lequel nous vivons, par ce en quoi il bouge et se transforme, par ses modèles de représentation, leurs carences, leurs contradictions, par les drames et les injustices qu'il produit... 

Question : qu'en serait-il pour l'art aujourd'hui ? Par quoi pourrait-il être traversé ?

Évidemment, il y a la fin des grandes croyances, celles qui devaient permettre d'atteindre le summum d'une vérité ou d'une réalité. Mais il y a aussi la fin de la suprématie de l'occident, il y a la globalisation, il y a la révolution des moyens et des pratiques de communication, il y a une réorganisation des guerres et de la distribution des richesses (c'est à dire de la pauvreté)...etc.

Ça pourrait se traduire comment ?

Il se pourrait qu'on apprenne à envisager la réalité comme instable et non plus comme déterminable dans une direction établie, que ce soit sous forme d'une lutte finale ou sous forme d'un jugement dernier. En ce sens, il n'y a plus ni centre, ni destination définitivement fixés, il y a voyage, aventure, découverte. Et ce n'est pas désespérant.

Ce n'est pas désespérant dés lors qu'on tente d'être conscient, dés lors qu'on interroge. Par ailleurs, rien n'interdit de rester constructif et naturellement révolté par les injustices et les abus de pouvoir qui n'ont, au demeurant, jamais été résolus.

Bayajaé - DécrochageIl s'agit de "voyager décentré" c'est à dire sans confondre provenance et appartenance, sans prendre l'origine pour le point central de référence :

une errance dans la multitude des rencontres et des possibles.

Ne fonctionnant plus par fidélité à une culture originelle, les déplacements se font croisements; des croisements qui permettent de penser, qui ouvrent des angles de vision inattendus. C'est cette pensée à découvrir sans cesse qui a de l'intérêt et non plus la fidélité obligatoire à un mode de pensée, à une origine, à une appartenance. Cela ne signifie pas qu'il faille changer sa manière de voir à chaque croisement, ni qu'il faille perdre la mémoire, ni même qu'on ne se projette plus dans l'avenir. Cela signifie que la pensée puisse gagner en liberté, et s'expérimenter ainsi en prenant forme.

Alors, plus que jamais peut-être, aujourd'hui l'art interroge. On ne serait plus dans une dynamique de progrès utilisant comme référence la fabrication de choses toujours nouvelles, pas plus que dans un retour à l'ancien. On serait dans l'expérimentation des changements d'angle du regard sinon comme solution, du moins comme recherche; l'émotion de la découverte se substituant à la croyance d'une vérité définitive et radicale.

C'est dans cette perspective que mon travail tente modestement de s'élaborer.

 

 

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  • Ce blog est une façon de penser à voix haute au sujet de la création artistique aujourd'hui. Juste des mots de passages. Quant à mon travail, pour en savoir plus : Chaîne Youtube de Bayajaé Photographies
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